Letter, 24 July 1749

Monseigneur,

Nous prenons la liberté de nous mettre sous la protection de Votre Grandeur et de lui représenter les malheurs auxquels nous expose la détention de M. Diderot, conduit ce matin à Vincennes par ordre du Roi. C'est un homme de lettres d'un mérite et d'une probité reconnus; nous l'avons chargé depuis près de cinq ans de l'édition d'un dictionnaire universel des sciences, des arts et métiers. Cet ouvrage qui nous coûtera au moins deux cent cinquante mille livres et pour lequel nous avons déjà avancé près de quatre-vingt mille livres était sur le point d'être annoncé au public. La détention de M. Diderot, le seul homme de lettres que n[ous] connaissions capable d'une aussi vaste entreprise et [qui] possède seul la clef de toute cette opération peut entraîner notre ruine.

Nous osons espérer, Monseigneur, que Votre Grandeur voudra bien se laisser toucher de notre situation et nous accorder la liberté de M. Diderot. Dans la recherche exacte qui a été faite de ses papiers il ne s'est rien trouvé qui puisse aggraver la faute par laquelle il a eu le malheur de déplaire à Votre Grandeur et nous croyons pouvoir l'assurer que, quelle que soit cette faute, il n'y retombera jamais.

Nous sommes avec un très profond respect, de Votre Grandeur

Les très humbles et très obéissants serviteurs
 

	Le Breton	David l'aîné

Durand Briasson

 
< Diderot's Internment at VincennesUPLetter, 28 July 1749 >